Altaïr
| Sujet: Fragment #24 - L'Alcool et le Sang 09.04.08 15:28 | |
| Vendredi 9 juin 2006 à Dijon L’heure du crime est franchie. Nous avons couru dans les ruelles nocturnes de Dijon. Il y a un quart d’heure encore, nous baignions dans un bain liquoreux et insouciant, et nous voilà contraint de reprendre nos esprits. Mon esprit se dépêtre pour lutter contre l’alcool et ses sortilèges. Je dois reprendre possession de ma pleine lucidité. Jill court devant moi, son portable à la main répandant une infime lueur sur les ombres. Un rêve me revient… n’était-ce pas Nalvenn ? n’était-ce pas Anubis ? Non, l’alcool essaye de me tirer à lui, je sens ses bras multiples se saisir de moi. Un soubresaut de ma conscience me permet de m’en détacher, mais je m’affale sur les pavés. Mon visage cogne contre la pierre, je sens le sang dans ma bouche. C’est âcre l’alcool, dégueulasse même, mais le sang… J’ai envie de vomir. Jill s’est retournée vers moi, le visage aussi dur que celui d’une Furie. « Relève-toi ! » crie-t-elle. J’obtempère. Tout tourne autour de moi. La ruelle gondole. Et voilà que nous repartons de plus belle, à courir je ne sais où. Nous parvenons enfin au pied d’un appartement sur la place du Marché. « C’est ici que ?… » Je ne suis jamais venu chez Jill. Nous montons les escaliers quatre à quatre. Je n’imaginais pas que ce puisse être aussi grand ; cette fille est pleine de mystères. Nous pénétrons en trombe dans l’appartement. En allumant la lumière, les ténèbres révèlent leur sinistre secret. Un homme est allongé sur le sol, dans un flaque de sang. Jill ne crie pas. Elle se précipite vers lui, s’agenouille dans la liqueur écarlate. Il règne une atmosphère lourde ici… Des effluves d’alcool sans doute. Il faudrait ouvrir une fenêtre, mais mes jambes sont clouées au plancher. Comme dans un repas de famille, j’ignore ce que je dois faire. J’ai l’impression de ne pas être là, qu’on impose ce spectacle à mon regard, mais non, je ne suis pas là, je ne peux pas être là. Jill, penchée sur le corps de son père, mêle des larmes à l’hémoglobine. Ce n’est pas de la tristesse. C'est de la rage. De la rage à l'état pur. La transfiguration s'opère.
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