Fragment #8 - Angoisse

Et voilà, après un week-end en amoureux, ces deux jours tellement intenses et courts, me revoilà dans ce train affreux qui m’envoie loin de Paris et de mon Amoureux.
Je déteste quand ce train m’enlève à lui, et pourtant j’aime ce long moment ou je n’ai que tout le temps de penser à lui, à nous, et à tous ces moments qui ont fait de notre week-end un vrai instant de bonheur.
Je me repasse toutes les scènes, unes par unes, comme un film qu’on aime voir et revoir sans cesse.
Je repense à nos ballades sur les quais de Seine, dans le quartier Saint Michel, avec tous ces artistes de rue impressionnants. Je repense à son bras autour de ma taille, à sa main qui serre la mienne un peu plus fort quand un autre homme me regarde.
Je le revois admiratif devant les magiciens de rues, comme un enfant qui s’émerveille de tout.
Et puis bien sûr je repense à ces moments torrides sous la couette (ou même ailleurs !).
Je sens encore ses mains sur moi, son souffle saccadé dans mon cou, son corps contre le mien.
Son odeur que porte encore mes vêtements n’aide pas à effacer ces moments de ma tête…
Et puis tout à coup, une impression bizarre d’oubli, une sorte de malaise : ma pilule !
Merde. Je l’ai complètement oubliée... Soudainement mes mains sont moites et je commence à paniquer. Il faut dire qu’au bout de plus d’un an passé ensemble, la capote n’est plus qu’un vieux souvenir. J’ai donc toutes les chances…non, tous les risques, techniquement parlant, de pouvoir tomber enceinte.
Je ne dois pas perdre mon sang froid, je ne dois pas céder à cette peur affreuse. De toutes façon c’est impossible, pas en une fois. On s’est toujours protégé de ce genre de chose, on a toujours fait attention, ça serait injuste de tomber enceinte à la première erreur, au premier oubli.
Je commence déjà à me demander comment, si jamais le pire se produit, je vais pouvoir l’annoncer non seulement à Ludo, mais à ma famille aussi.
Oui parce que si avoir un enfant est le plus grand rêve de ma vie, je rêve de tomber enceinte dans les meilleures conditions. Une fois que ma maturité et mon compte en banque me permettront de subvenir à tous les besoins et au bonheur de cet enfant.
Mais aujourd’hui il ne faut pas, pas maintenant. Ca gâcherait tout…
Ce voyage qui si souvent me permet de me sortir peu à peu de la torpeur féerique de nos week-ends se transforme en un cauchemar affreux et angoissant…