Altaïr
| Sujet: Fragment #261 - Dijon - Rome 12.04.08 17:45 | |
| Samedi 14 juillet 2007 à Dijon Passer chez Papa et Maman Avenue Victor Hugo pour leur dire au revoir. Oui, je pars en Italie quelques jours avec une amie. Non, rien de sérieux, ce n'est pas ma petite amie. Enfin, c'est compliqué. Non, je ne passerai pas en Toscane pour voir la Nona, ça n'est pas prévu dans notre itinéraire. Oui, on a un itinéraire, et alors ? Rome, Naples, puis Florence, Milan et Venise. Traversée de la botte à travers les plus belles de ses villes. Je suis tellement impatient... Rentrer à l'appartement rue Docteur Chaussier avec la Liane 1, passer devant Mme Richard qui me dévisage avec méchanceté. Elle ne me manquera pas celle-là. Je n'ai pas le temps d'aller au Dionysos, tant pis, ce sera pour mon retour. Si retour il y a... S'organiser avec Lilian pour s'assurer que tout se passe bien pendant mon absence. Les courses, les poubelles, le ménage, etc. Alexandre va venir dormir ici quelques temps, il pourra prendre ma chambre si il veut. Je m'en moque. Préparer ma valise. Je ne sais pas combien de temps durera notre voyage improvisé. Pourquoi faut-il toujours que je m'y prenne au dernier moment ? Déjà l'an dernier, avant de partir à Paris, tout s'était fait en vitesse, juste avant le départ avec Nalvenn et Sébastien. J'embrasse Lilian -prend soin de toi petit frère-, échange avec Alex une poignée de main amicale -et pendant un instant il me semble que le feu se deverse de son être dans le mien, que je deviens le feu qui l'habite, et déjà la glace fond un peu en moi-, avant de quitter, pour une durée indéterminée, le temple de nos rêves éveillés. Je rejoins Laetitia dans son appartement, beaucoup plus grand et luxueux que le nôtre. « Prête à partir ? - Ouais, et toi ? - Bah, on est jamais vraiment prêt... » Nous mangeons dans un petit restaurant chic aux prix exorbitants. C'est cela, la vie en compagnie de Laetitia Mizri, fille d'un des plus grands propriétaires immobiliers de la région. Je regarde ses joues, la peau veloutée qui semble presque artificielle tant elle est parfaite. Et le mouvement dédaigneux de sa bouche en pleine mastication. Elle semble se foutre de tout ça, l'Italie, le voyage, les vacances. Pour elle, rien n'a plus d'entrain, le monde est à portée de sa main. Alors je me force à simuler la même indifférence, quand bien même mon sang fébrile tressaute à l'idée de découvrir tant de merveilles. Progressivement, le jeu ingéré anesthésie mon enthousiasme jusqu'à la racine. Sur le quai de la gare de Dijon. La dernière fois que je suis venu ici, Jed et moi avons échangé un baiser, notre dernier baiser avant son départ pour Londres. Comme tu me manques, Jed, si tu savais à quel point... Tu as laissé dans mon coeur un vide cruel que ni Justin, ni Laetitia, ni personne, n'est en mesure de combler. Le train... à destination de Rome... La voix désincarnée des hauts-parleurs semble jubiler elle-même en prononçant le nom d'une telle ville. Je sens tout mon corps qui frissonne d'excitation. Bientôt je vois deux phares percer les brumes de la nuit, ce sont les yeux du train qui s'avance. 21h41. Nous nous installons dans un compartiment. Je range nos valises. Il y a avec nous un couple d'américains venus de Californie, la trentaine passée, avec qui je sympathie rapidement. Laetitia est agacée. Finalement, j'aimerais presque qu'elle ne soit pas là. Peur qu'elle ne gâche tous mes ressentis, par son mépris perpétuel et son sale caractère. Le train est en marche. Nous quittons Dijon. Dans le compartiment, personne ne parle. On dispose les couchettes pour dormir. Je voudrais me lover tout contre Laetitia, mais il me semble qu'elle veuille dormir seule. A croire qu'elle me boude. Je m'allonge sur la banquette brinquebalante, le nez collé contre la fenêtre du train. Dehors, des formes mouvantes défilent à grande vitesse sans que je puisse les reconnaître. Je pense à moi, à ma vie, à ce corps en déplacement sur la surface du globe, et pourtant immobile. Je pense au sens de ces changements qui surviennent dans nos existences, je pense au Destin. Et je m'endors en songeant que demain matin, aux alentours de 10h, nous seront arrivés à Rome... | |
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