Fragment #88 - Je suis à Elle

Avoir un enfant, c’est merveilleux. Je passe mon temps à la regarder s’éveiller, grandir à vue d’œil… Avoir un enfant c’est merveilleux, sauf quand l’enfant en question est un lève tôt ! Un lève-tôt glouton qui réclame sa tétée à 4h du matin ! Heureusement que Papa et Maman sont autour de nous pour cadrer tout ça, parce que l’air de rien, être mère, c’est du boulot !
Nous sommes rentrées à la maison depuis mardi matin. Un vrai comité d’accueil nous attendait à la maison… Mes grands-parents (qui trouvent évidemment que Kokhavah a tout pris de leur côté !) les filles, et quelques amis à qui Papa et Maman rêvaient de montrer leur « petite merveille » !
Ils sont venus nous chercher dans la matinée, j’avais déjà préparé toutes nos affaires, fait le lit de l’hôpital, tout remis en ordre. Papa a pris Kokhavah avec lui, et Maman est partie avec eux installer le siège-bébé dans la voiture. Je suis restée assise sur le lit quelques bonnes minutes. J’attendais un peu Théo je crois… même si je lui avais dit que je ne voulais pas qu’il vienne me dire au revoir, que ça ressemblerait trop à un adieu et que je ne voulais pas que c’en soit un.
Instinctivement, je passe la main sous mon oreiller. Ah tient, je crois bien que j’avais oublié quelque chose… Un papier de bonbon ! Dernier vestige de nos fringales à Théo et à moi. Mmmm, à la framboise, mon préféré ! Je le retourne… « Tu vas me manquer » griffonné au crayon, presque déjà effacé par le sucre encore tout collant. Alors il ne m’oubliera pas…
4h du matin donc, j’entends ma petite poupée gazouiller.
« Oui oui chérie, la vache laitière arrive ! »
Je m’extirpe de mon lit, la prends contre moi, rejoins le fauteuil douillet que Maman a installé exprès près du lit de Kokhavah, et répète ces gestes qui sont devenus presque des automatismes. Le sein droit d’abord, cinq minutes.
Je pose ma tête contre le coussin molletonné et part à rêver. Mon esprit me ramène directement à l’hôpital, en salle des internes plus particulièrement ! J’essaye de me souvenir de chaque trait du visage de Théo, chaque expression, chaque sourire. Je me rappelle de ma main dans la sienne, de ces heures passées à se goinfrer de bonbons en refaisant le monde…
Aïe ! Mon petit diable me pince ! Ok ma belle, on change de côté !
Sein gauche, cinq minutes…
Son visage donc. La douceur de ses traits, de son regard bleu azur. Cette petite fossette qui apparait quand il sourit… Il doit bien faire un bon mètre quatre-vingt. Grand, pour protéger ! Brun, comme je les aime. Doux, compréhensif, et puis doué avec les enfants de ce que j’ai pu voir…
Aïeeeuh ! Ok c’est bon, on arrête ! Désolée de penser à quelqu’un d’autre qu’à toi ma petite Princesse possessive qui sent tout !
Je regarde ses grands yeux noirs me fixer. Elle est déjà tellement éveillée ! On croirait qu’elle comprend tout ! En tous cas, elle sent tout, ça c’est sur !
Je la serre contre ma poitrine encore nue, à peine quelques minutes à la bercer et la voilà repartie dans les bras de Morphée !
Je la repose dans son lit, et retourne me mettre au chaud au fond du mien. Ici, seule, mes rêves et pensées n’appartiennent qu’à moi…