Fragment #102 - J'ai perdu mes sens quelque part sur ta peau

Tourbillon d'émeraude, tempête d'eau putride, les vagues vertes de Ses yeux ; et le métal en fusion qui remonte, bouillonnant, à la surface de mon monde, qui s'échappe en gouttes légères et amères, qui coule sur le marbre échauffé par Ses mains. Ouragan vertigineux qui s'empare de mon esprit, je suis le centre du monde, il danse autour de moi, apparaît un instant puis disparaît sous les voiles de la nuit. Et je ne sens plus rien ; Son corps contre mon corps, le parfum de Ses cheveux, la chaleur de Son souffle. Cadavre encore vivant ; j'ai perdu mes sens quelque part sur Ta peau. Laisse-moi explorer avidement la moindre parcelle de Ta chair, glisser ma main morte sur Ton dos brûlant ; enfouir mon nez dans Ton cou, il pleure Ton odeur. Laisse ma langue caresser jusqu'au plus petit de Tes muscles et imaginer le sel de Ta peau. Permets à mes yeux aveugles de Te regarder toujours, à mes oreilles déchirées d'écouter le murmure de Ton souffle. Elle s'est emparée de mes sens, et tout est devenu flou. Laisse-moi me retrouver sur Toi, telle qu'avant. Permets-moi d'oublier la douleur, le pincement incessant. Déverse-Toi sur mon ventre, Ton sperme chaud et âcre, le poison. Permets-moi d'oublier, le marteau qui frappe mes tempes, la vague nauséeuse qui me submerge. Et le mal dans mon ventre, le Mal qui se propage même dans Toi, le Mal qui me rattrape, l'Horloge qui m'assène « Souviens-toi ! ». Les perles de métal qui fuient tant qu'il est encore temps, traînée froide sur mon corps en fusion ; les vagues d'eau saumâtre qui ne comprennent pas, la tornade grise qui m'enveloppe de ses bras rugissants.
Le marteau dans ma tête, la nausée qui revient, et plus jamais ne partira.
Souviens-toi.