Fragment #6 - L'immersion

Le Japon est un pays extraordinaire. Cela fait une quinzaine que j’y suis et je n’ai même pas encore eu le temps de visiter ne serait-ce que mon quartier. J’ai la sensation qu’une vie entière ne suffirait pas pour apprécier toutes les richesses de ce pays !
Ce matin c’est une bouffée de chaleur qui, comme tous les matins depuis mon arrivée, m’extirpe de mon lit humide de sueur. En me réveillant, je tire le fin rideau et regarde à travers la vitre le thermomètre accroché sur le mur extérieur de la maison. Il fait quarante degrés. Pour le petit européen que je suis, accoutumé aux climats plus tempérés, c’est assez difficile à supporter. Mon père dit que ça finira bien par se calmer et que quoi qu’il en soit les japonais vivent avec, alors pourquoi pas nous.
Un certain gaulois enveloppé – j’ai pas dit gros – aurait déclaré « ils sont fous ces japonais ». A quarante degrés à l’ombre on les voit travailler en costard cravate dix à douze heures par jour. Cela m’effraie énormément, car c’est ce que mon père fait, et c’est sans doute le destin qui m’attend si je continue dans cette voie.
Bientôt je vais entrer à l’université de Kanazawa, ma mère m’a déjà aidé à aller choisir ma taille d’uniforme. Je vais fondre et finir aussi mince qu’une baguette si je passe l’été dans un tel accoutrement pour faire mes études ! Au Japon les grandes vacances ne tombent malheureusement pas en été. D’ailleurs peut-on parler de grandes vacances ? Trois semaines… Que je risque de passer à réviser mes examens de plus. Je me rattraperai sur les jours fériés, beaucoup plus nombreux que chez nous ici.
Il y a tant de choses nouvelles pour moi ici, tant de choses à découvrir que je n’ai pas le temps de penser pour l’instant à ce qui vient de se passer. C’est comme si j’étais en voyage et que j’allais rentrer bientôt, je ne suis pas inquiet et mon pays natal ne me manque pas encore. Elle en revanche…