Bételgeuse
| Sujet: Fragment #108 - Aujourd'hui n'est pas le jour 13.04.08 20:12 | |
| Mercredi 14 mars 2007 à Dijon Dehors, le voile sombre de la nuit commence à peine à se lever, berçant la ville d'une lumière à la fois grise et bleutée. Le murmure de la télé me parvient, brouillé par un léger grésillement ; tout semble m'inviter au calme malgré le retour de l'insomnie, la grande et sublime faucheuse de rêves, qui arrive sans prévenir et sans raison, et empêche de trouver le sommeil, ce moment de salut quotidien. J'implorerais Morphée de me serrer entre ses bras voluptueux jusqu'à m'en étouffer, de m'étrangler de poussières d'étoile, de me pendre à mon fil de vie, si cela pouvait m'apporter le repos. Le Temps s'écoule goutte à goutte, et chaque grain de sable du sablier est un coup d'horloge qui me hurle « Souviens-toi! ». Le drap est mon linceul, et la clarté du jour nouveau qui me berce est mon tombeau. La douleur s'est mise en sourdine, peut-être suis-je déjà morte ? Ou n'est-ce que la fatigue qui alourdit mes membres et capture mes sens ? Mon regard se perd par la fenêtre, et cherche dans le ciel encore zébré de nuages une réponse à l'éternel recommencement et du jour et de la nuit. Nous sommes prisonniers de leur cercle sans fin, et cette certitude est telle quelle a chassé la peur de ne jamais voir réapparaître le jour. La vie ne serait plus que nuit... La vie ne serait plus que mort ? Est-ce ça, la fin de tout ? Rester immobile, laisser vagabonder son esprit, ne plus se laisser submerger par le Mal. Voyager par la pensée. Partir... Je me sens bondir, à l'intérieur. J'attrape mon paquet de clopes, mon briquet. Me laisse envahir par la fumée ; tu as encore ta place ici, prend tes aises. Tu es encore maîtresse en mes bronches oxydées. Et, tandis que je pollue mon corps, la douleur revient. Le pincement incessant, l'aiguille plantée dans mon ventre. Tu me fais me sentir vivante, et pour cela je t'aime. Dehors, le soleil pointe le bout de son nez. Aujourd'hui n'est pas le jour où je partirai. | |
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