Fragment #393 - Je vais et je viens, entre tes reins

Le vieux type aux cheveux longs s'apprête à quitter le McDo, sa guitare dans les mains, habillé de ses guenilles ultra-colorées. Il nous salue d'un grand signe de la main, nous, équipiers de fast-food un peu décontenancés.
« Eh bien je vous laisse mes amis, et rassurez vous, selon mes calculs, la journée se terminera à merveille pour chacun d'entre vous, excepté ceux qui ne sourient pas ! »
Aussitôt je lance un regard à Max, qui secoue la tête sans oser mettre lui-même dehors ce vieux clochard qui ne l'amuse pas du tout. Et j'en viens à espérer que ces paroles de prophète se révéleront exactes.
« A la prochaine, si le coeur vous en dit ! achève le vieil homme en disparaissant du McDo. »
Un sourire m'égaille le coeur, ravivé par ce ménestrel des temps modernes. Je regarde autour de moi et réalise que nous avons tous été contaminés. Juliette, Ben, Anaïs, Kim éclatent de rire en cœur, et, au grill, Goran me lance un clin d'oeil chargé de tendresse. Je me liquéfie un peu plus au FCN et manque de me brûler à l'huile bouillante. Il me semble pourtant que je ne ressentirais pas la moindre sensation de chaleur, et que mes mains pourraient y plonger et en ressortir indemnes, tant je suis heureux, avec au fond de moi cette sensation immense d'invincibilité.
Vider le sachet dans la panière. Placer la panière dans la friteuse. C'est parti. La mécanique des gestes est désormais d'une simplicité enfantine.
Pause. Nous sortons dehors, place de la République, pour fumer. Le temps est radieux. Un soleil brûlant inonde le ciel bleu limpide et éclatant. L'astre lion signe ainsi son grand retour, en beauté.
Goran, dans mon dos, passe ses bras autour de moi. Je sens son souffle chaud sur ma nuque, ma nuque qu'il tapisse de bisous délicats. Durcissement.

Tes mains sur mon corps vont et viennent et me déshabillent. Je te rends la pareille. Nos bouches ne peuvent se quitter. Si elles venaient à se lâcher quelques secondes, nos regards se croiseraient, deux sourires éclateraient sur nos lèvres, et nous nous collerions aussitôt l'un à l'autre. Je crois que je t'aime.
Ta peau savoureuse, couleur de croissant chaud. Tu es mon pain aux amandes, et je veux te croquer, et sentir la texture sucrée de ton épiderme sous ma langue. Lorsque je vais et je viens, entre tes reins, il me semble que j'ai réussi, enfin.
Je suis toi et moi à la fois.