Alioth
| Sujet: Fragment #31 – Un vent de fraîcheur entre les pierres séculaires 25.06.08 0:55 | |
| Mardi 24 juin 2008 quelque part entre Pampelune et Saragosse Il fait sombre à l'intérieur, alors que le soleil frappe très fort dehors. Il n'y a pas vraiment de vent ; c'est un peu comme si le ciel nous assommait. A l'intérieur, l'odeur de la pierre vieille de quelques centaines d'années (il me semble en tout cas) me réconforte : c'est un peu épicé, envoûtant sans être enivrant, fort, puissant, mâle. Le père chantonne en effectuant plusieurs va-et-vient d'une pièce à l'autre. Il fait frais. Je me sens bien. Grégoire est quelque part entre ces murs. Je ne sais où. J'en profite pour fermer les yeux et écouter le père chantonner. C'est paisible ici, au milieu de nulle part. Puis j'entends des bruits légers de pas, des rires, et quelqu'un me touche. C'est lui. Je sursaute. C'est lui : yeux bleus immensément ouverts et pétillants, cheveux blonds bouclés et rebelles, un sourire perpétuel sur les lèvres, une candeur fraîche et énergique. C'est lui : qui saute, s'essaie à de multiples culbutes, au point parfois de tomber et de se mettre à pleurer pendant quelques secondes en se frottant la tête, puis de recommencer juste après comme si ce n'était jamais arrivé. Si je décide d'écrire, il s'approche de moi, prend mon crayon, gribouille des lignes verticales, des traits dans tous les sens, rit de son art, jette le crayon, passe à autre chose, court à travers les pièces, touche à tout. Si je lui tends le stylo, il fait la moue, répète sans cesse "no quiero" comme si je parlais Espagnol moi ! C'est lui, entre ses murs, les siens, son domaine, il est le roi, l'attraction, le centre d'intérêt. Je n'existe pas. Quand Grégoire et lui sont dans la même pièce que moi, je suis quasiment transparent, je pourrais m'ouvrir les veines devant eux que cela ferait rire l'enfant et Grégoire ne le remarquerait même pas. Je suis devenu insignifiant.
Et, cependant, je ne peux pas le détester. Je l'ai détesté pendant des jours avant, tout le long du trajet également, mais dès que je l'ai vu, dès que j'ai vu son sourire, celui de Grégoire, celui du Padre, ma haine s'est évanouie soudainement. Les murs de cette bâtisse me l'ont volée, déchirée, anéantie. Il est beau, frais, naturel, insouciant et tellement présent entre ces murs qui ont vu les années s'évanouir, la sècheresse sévir, les pluies manquer, le soleil assécher la peau des vieillards. C'est une apparition dans ce monde serein et ancien. Un petit ange qui bouscule toutes les idées que j'avais pu me faire de lui.
Des mains sur mes épaules. Un souffle dans mon cou.
Tu vas bien ? Oui. Je regarde Michaël : il a une énergie surprenante. Oui, c'est vrai. C'est l'âge.
Je me retourne et regarde Grégoire. Comme il est beau, lui aussi ! Comme il a changé à mes yeux depuis que j'ai vu cette tête blonde, ce gamin qui est le sien !
Tu ne regrettes pas d'être venu ? Non. Cet endroit est fascinant. Oui : le désert à quelques heures de la France. Ca et ce lieu, ce monsieur que tu appelles Padre, cet enfant, ce calme, tout, tout. Je me sens tellement...reposé, apaisé. Oui, quand je viens ici, ça me fait toujours cette impression. Loin de tout. Pas vraiment de civilisation. Mais comment pouvais-tu m'appeler ? Je n'ai pas vu de lignes téléphoniques ici et mon portable ne capte pas. De temps en temps, nous allons à Tudela. Nous irons demain, si tu veux. Sans Michaël, rien que nous deux. Il peut venir tu sais. Oui, il peut venir. Mais je veux qu'on soit tous les deux. On peut même dormir une nuit là-bas. D'accord. Bien.
Il prend Michaël par la main, lui dit qu'il faut aller faire une sieste et se calmer, le petit répond "no quiero" en secouant la tête. Il fait quelque chose que je ne vois pas et le petit se calme, attrape la main de son père (mince, de son père !) et ils disparaissent dans l'obscurité des couloirs.
¿Quieres ver el río? Je ne comprends pas l'Espagnol. ¿El río? ¿Agua? De l'eau ? Ah, el rio, le fleuve ? Si. Il y a un fleuve dans ce désert ? Si.¡Sígueme!
Je me lève. Le Padre pousse la lourde porte. La chaleur s'engouffre dans la maison et me frappe en plein visage. Il me tend un petit foulard blanc que je place sur mon crâne. Nous contournons le puits, descendons les quelques marches improvisées dans la roche, dépassons un bosquet énorme et feuillu, puis le paysage se découvre, ensemble de petits monticules calcaires, déformations du sol granuleux, collines tabulaires au loin et chemins naturels tortueux qui serpentent entre des espèces de cheminées qui sortent de terre. C'est tout simplement époustouflant. Je ne dis rien. Le Padre pointe du doigt un endroit que je ne distingue pas vraiment pour l'instant. Quand nous avançons un peu plus sur le terrain en pente, je découvre alors une rivière en bas. Puis une végétation de plus en plus abondante. | |
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Procyon
| Sujet: Re: Fragment #31 – Un vent de fraîcheur entre les pierres séculaires 25.06.08 12:50 | |
| Preum'z
Et il doit manquer des espaces dans : " Si.¡Sígueme! "
Les mots ont résonnés sincèrement à mon oreille. Sont-ce les murs de pierre du domaine qui font cet effet là ? ... Bravo. :P | |
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Altaïr
| Sujet: Re: Fragment #31 – Un vent de fraîcheur entre les pierres séculaires 25.06.08 21:02 | |
| Oui, il manque un espace après le "." mais pas après ni avant les "!" espagnols. Un espace manquant aussi après un "...".
Sinon je trouve ça vraiment très prenant, et Amaury qui révèle sa compassion après avoir donné une image de gros dépravé, c'est super chouette :) J'aime quand les personnages ne sont ni tous noirs ni tous blancs :) | |
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Alsciaukat
| Sujet: :) 26.06.08 10:53 | |
| Mh j'avais lu sans commenter, mais comme à peu près toujours avec Amaury, j'adhère ^^' | |
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Procyon
| Sujet: Re: Fragment #31 – Un vent de fraîcheur entre les pierres séculaires 26.06.08 12:52 | |
| Oui Alti, et moi je me disais même que le "mauvais" côté d'Amaury était parti faire un tour chez Julian. | |
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Altaïr
| Sujet: Re: Fragment #31 – Un vent de fraîcheur entre les pierres séculaires 27.06.08 8:12 | |
| Le Julian dépravé existait avant Amaury, Pro... | |
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Procyon
| Sujet: Re: Fragment #31 – Un vent de fraîcheur entre les pierres séculaires 27.06.08 10:41 | |
| Oui mais il s'était beaucoup effacé par rapport aux autres facettes de Juju | |
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Altaïr
| Sujet: Re: Fragment #31 – Un vent de fraîcheur entre les pierres séculaires 27.06.08 11:57 | |
| Depuis quand ? Depuis qu'il est rentré de Londres ? Waaa... | |
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| Sujet: Re: Fragment #31 – Un vent de fraîcheur entre les pierres séculaires | |
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