Procyon
| Sujet: Fragment #163 – La couleur des larmes 01.12.08 23:09 | |
| Lundi 1er décembre 2008 à Villeneuve Saint George 8h07. Il y a beaucoup de gradés dans la cour d'honneur pour le levé des couleurs. Plus qu'à l'accoutumée. Matin glacial. Ce n'est pas le vent froid, ou les restes de neige dans la cour qui sont les plus glacials ce matin ; mais l'annonce que l'on vient de nous faire. Je ressitue : vendredi matin nous étions évalués en manœuvre incendie. C'est à dire qu'on courrait de réels risques dans un faux accidents. Faux danger et vrai feu. Nous passions par binôme. Dans la cave enfumée. Enflammée. Je suis ressorti exténué avec Josselin – un autre bourguignon avec qui j'ai sympathisé -, nous avons eu de la chance de passer ensemble. Le but étant de rentrer, harnaché comme un bœuf de compétition, dans la cave, de réaliser les différents exercices que l'on a appris et répétés maintes fois en situation non dangereuse. Il suffisait de les répéter dans un environnement hostile, pour éteindre l'incendie. Marc est entré juste après que nous soyons sorti Josselin et moi. Je me souviens les avoir gratifiés, lui et son binôme, d'un « Bonne chance » amical à leur passage, malgré l'état d'épuisement dans lequel j'étais. Tout ça de visu. Ensuite, des dires des suivants, il s'est senti mal et s'est effondré à l'intérieur. Son collègue n'a pas pu le ressortir seul. Il est ressorti chercher de l'aide. Puis il y a un grand flou dans les explications balbutiantes des quelques camarades présents. Marc a été immédiatement transporté à l'hôpital. Juste pour des analyses nous a-t-on dit. J'ai entendu dire qu'il était parti inconscient, la version officielle était qu'il ne l'était qu'à moitié. Comment peut-on être à moitié conscient ? Ou à moitié inconscient ? Quoi qu'il en soit, il se serait réveillé et aurait dit quelques mots ce weekend. Sur le même draps se sont levés le bleu nuit, le blanc oubli, et le rouge sang. Marc Neumeillie est mort. Voilà ce que je viens d'entendre. Ce ne sont pas là les mots qu'il aurait prononcé à l'hôpital et que je m'apprêtais à entendre. Une phrase très courte. Résonnant dans le silence. Suivit de murmures, rapidement tus par la poursuite du discours matinal. Et en moi ces murmures reprennent : A-t-il bien dit que Marc Neumeillie est mort ? Décédé. Parti. Mort. Éteint. Voilà ce que l'on peut entendre maintenant que les rangs sont rompus. J'avais malheureusement bien entendu. Tristesse et désolation. J'ai déjà perdu un père, mais dans cette nouvelle famille, que représente le corps des pompiers, je perds un frère. Je réprime une larme. Ici ça ne se fait pas.
Dernière édition par Procyon le 01.12.08 23:29, édité 1 fois | |
|
Altaïr
| Sujet: Re: Fragment #163 – La couleur des larmes 01.12.08 23:28 | |
| | |
|
Procyon
| Sujet: Re: Fragment #163 – La couleur des larmes 01.12.08 23:30 | |
| MEP ok Etrangement moi ça va mieux. Enfin "étrangement" : c'était tout de même le but recherché. | |
|
Altaïr
| Sujet: Re: Fragment #163 – La couleur des larmes 01.12.08 23:34 | |
| Je me disais bien que tu ressentirais le besoin d'évacuer par le biais de l'écriture... Si ça t'a apaisé, c'est une bonne chose. | |
|
Alhena
| Sujet: Re: Fragment #163 – La couleur des larmes 01.12.08 23:52 | |
| Très beau frag. Je ne sais pas qu'est-ce qu'il fallait que tu évacues, mais j'espère que ce n'était pas trop grave... | |
|
Contenu sponsorisé
| Sujet: Re: Fragment #163 – La couleur des larmes | |
| |
|