Fragment #234 – Loin de tout

Dimanche 14 mars 2010
à Kouandé

18h24. Le soleil est déjà couché. Aujourd’hui on est dimanche, ce n’est pas le jour du seigneur, mais c’est un jour de repos quand même. Ce matin, Emile a voulu me montrer son troupeau. Nous sommes allés droit à l’Est en direction du soleil qui se levait devant nous. Ses huit vaches broutaient des cailloux dans un endroit qu’il appelle prairie. Quelques brins d’herbes entre les pierres, et surtout la rivière à proximité. C’est à cette même rivière –le Semoda – que les femmes du village viennent chercher de l’eau. Il était fier de me montrer ses vaches bien nourries, au squelette visible.
Assis près du feu, je repense au soleil de la journée. Je pense aux couleurs de la rivière, aux reflets de l’astre sur l’eau ; et dans l’âtre une autre image m’apparait. Des vaches. Des vaches bien en chair, dans un pré verdoyant. L’herbe monte jusqu’à mi-jarret, et derrière elles, le clocher de Laroche-Milay. Le Morvan. Mes racines et ma famille. J’en suis loin. Je suis loin. Ai-je fait le bon choix ? Partir. Partir c’est bien, mais partir loin, c’est loin. Je pense déjà à mon retour. Est-ce que cela signifie que je ne voulais pas partir ? Non. Si. Bien sûr que si que je voulais partir. Autour des vaches bien grosses, ils me font des signes. Ils sourient, et même les vaches bien grasses, semblent heureuses. Ils veulent simplement me souhaiter bonne chance. Oui c’est cela. Ils sont contents pour moi. Je ne dois pas m’inquiéter. Je dois profiter.
Je prends mes genoux dans mes bras, et je lève la tête vers le ciel. Les étoiles arrivent. En fiat elles sont déjà là depuis longtemps, mais elles attendent la nuit pour qu’on les allume. Elles ne veulent pas briller pour ceux qui ne les regardent pas. J’aime bien les étoiles. J’ai l’impression de pouvoir les toucher. Ici elles sont plus près.
Maïjan et Neline s’occupent du repas pendant que Jena joue avec « Bébé ». Bertrand a ramené les autres au Sud pour qu’ils prennent l’avion. Il devrait être là en milieu de semaine.