Fragment #1 - Introduction

Aujourd’hui j’ai pénétré les Portes de l’Enfer pour la seconde fois en une semaine. Je n’ai pas plus que cela envie de rencontrer le Suppôt de Satan mais je me suis mis en assez mauvaise posture. Je passe le portail électronique en souriant, de quoi Satan a-t-il peur ?
Dans les arcanes administratives les couloirs mènent à des escaliers qui mènent à des couloirs qui butent sur des portes qui ouvrent sur de nouveaux couloirs et tout au long des couloirs des bureaux numérotés, et le tout sous une lumières tamisées, avec des moquettes suffisamment épaisses pour étouffer les sons des pas les plus surs, les Portes de l’Enfer veulent rester calmes et tranquilles… bonjour Madame, bonjour Monsieur Blabla…
Le Suppôt et ses Sbires sont évidemment disposés à me rencontrer mais ils en veulent plus encore plus, ils veulent que je me torture avant de me rencontrer, que je prenne bien conscience de la mauvaise posture dans laquelle je suis et que je fasse allégeance, que je mette un genoux à terre et baisse la tête, et je sais que je le ferai car quand j’ai accepté les règles du jeu je savais qu’ils en étaient les garants, j’avais prévu la défaite, pas que cela me couterait aussi cher, et que cela soit aussi compliqué.
Je m’éloigne des Portes non sans avoir souri devant le portique électronique une nouvelle fois : ce n’est pas Satan qui a peur mais ses Suppôts, ses Sbires et tutti quanti et mon sourire redouble devant le gardien au teint hépatique qui surveille la porte, il, le Suppôt, maintient la pression à tous les niveaux. Mais très vite une pensée gâche mon sourire, j’ai joué gros, j’ai impliqué ma famille et j’ai perdu, ma famille m’a donné l’or et je l’ai transformé en quoi ? En fumée, effaçant encore plus mon sourire. J’avais tout au bout des doigts, et j’en avais conscience, mais parfois rien ne se passe comme il faut, j’ai regardé le temps filer et il en a profité.
Pour l’heure je dois me préparer à affronter le Suppôt et ses Sbires, de façon fugace je pense à une époque passée ou j’étais plus proche de l’équipe précédente, mais d’un revers de la main j’éloigne cette pensée, le passé c’est dépassé et je dois me focaliser sur mon objectif futur en restant discret.

Je regarde dans le rétroviseur, la tempête se rapproche vite, trop vite et pourtant je ne ménage pas mes chevaux, j’accélère autant que possible mais la chaussée devient glissante et je dois prendre de plus en plus de risque, un œil sur l’heure, un autre sur le compteur, je dois encore une fois lutter contre le temps, mais je l’avoue j’adore sentir la pression et j’adore rouler vite, enregistrer tous les paramètres de sécurité et repousser les limites du possible, et je méprise les pisseux qui voudraient m’en empêcher, les partenaires des Forces de l’Enfer sont de plus en pressants et nous font rentrer leurs peurs par tous les moyens qu’ils crèvent enchevêtrés dans le métal tordu de leurs véhicules.
J’ai réussi à prendre la sortie, j’aperçois au loin les Portes de l’Enfer un coup d’œil sur l’heure, je devrais arriver à temps, mon mono grogne et monte en tours, je suis trempé, mais il faut que je dépose ce p’tain de dossier avant la fermeture, le gardien hépatique prépare ses affaires, oui je suis dans les temps.
Je tourne le dos aux Portes de l’Enfer, le soleil est toujours derrière les nuages, il pleut je suis trempé mais qu’importe la nuit s’approche et je serais prêt.