Alsciaukat
| Sujet: Fragment #83 - L'errance du Corbeau dans les limbes 13.04.08 16:40 | |
| Lundi 14 mai 2007 à Tours Ils me jettent parfois de petits regards en coin. Ils se demandent si je vais encore péter un plomb. Je ne sais pas vraiment ce qui m'est arrivé. La fatigue extrême qui me tenait, sans doute. Quelque part, ce n'est pas forcément plus mal, ils ont encore plus peur de moi à présent. Car c'est bien de la peur que je lis dans leurs yeux. Pas du mépris, pas de la haine. Ils ont simplement peur. Ils ne veulent pas avoir à me parler. Même le regard de Marie devient terne, éteint, quand il croise le mien. Elle a honte, je crois. Honte de m'avoir abandonné. Elle s'en veut mais n'ose pas revenir vers moi. Peut-être que je la reprendrai un jour. Pour la jeter ensuite. Ce serait une jolie vengeance. On dit que la vengeance est l'apanage des enfants et des faibles d'esprit ; gageons qu'elle est aussi celui de ceux qui s'ennuient. Finalement, seul Georges n'a pas peur de moi. Il est toujours curieux. Il m'a demandé ce qui s'était passé dans mon crâne, l'autre fois. Il ne s'est pas inquiété, n'a pas été effrayé. Juste cette sorte de curiosité sans fond qui tente de m'aspirer, de me cerner, de me résumer. Ca ne marche pas comme ça, Georges. Je ne lui ai pas dit, parce que ses tentatives sont parfois amusantes. Mais je ne suis pas catalogable comme les autres ; et ce, tout simplement parce que je ne montre rien de moi. Tu peux toujours chercher. En ces lieux le silence même est superflu. Il tombe dans le calme des flocons de glace Qui descendent au sol et doucement s’y placent En un tableau gelé où les détails affluent.
Le Corbeau est donc mort après avoir perdu son jugement. Y a-t-il un paradis pour les corbeaux ? Je les entends qui volent dans mon crâne...
Des falaises s’élèvent de chaque côté, Imposantes et blanches, repères massifs Dessinant la vallée dénuée de récifs, Comme si un géant les avait tous ôtés.
Dans ce gouffre infini place une forme noire Portée par des courants pourtant inexistants, Aux yeux sombres, sans vie, sinistres entonnoirs.
Il n’y a pas de temps, un jour et un instant, Pour l’obscure silhouette à l’allure indécente ; Et l’âme du Corbeau annonce sa descente.
Le corbeau se prépare une nouvelle peau, pour renaître de la glace. C'est ainsi, il vit par cycles. Il ne peut mourir tout à fait. Il apprend de ses erreurs et... et la sonnerie retentit. Je prends rapidement ce que j'ai raté du cours en note, puis range mes affaires. En sortant de la classe, je me rends compte que, plutôt que de me bousculer, les autres ont tendance à s'écarter pour me laisser passer. Je crois qu'ils ne veulent pas me toucher. Bien leur en fasse. J'arrive à la porte, jette un rapide regard à cette assemblée bruyante et joyeuse. Continuez comme ça... | |
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