Fragment #11 – Tu as bien dormi ?

Je suis dans les toilettes et cela fait une demi-heure que j’ai mal au ventre. J’ai une boule à l’estomac, une poche de gaz qui grogne à l’intérieur. Nous avons fait l’amour toute la nuit, puis toute la journée, puis encore toute la nuit suivante. Mon anus est très largement ouvert. Je me sens sale et je suis dégoûté. J’ai envie de dire à Cédric, qui dort encore dans la chambre, de partir. Pars et ne reviens plus. Je remonte mon boxer, tire la chasse d’eau, prends une cigarette et vais m’asseoir à côté de lui. Il est beau. Il est beau quand il dort, il est beau quand il me fait l’amour et je pourrais bien le réveiller et lui demander qu’il me fasse l’amour une autre fois. Je pourrais. Mais il me dégoûte aussi. Qui es-tu pour entrer ainsi dans mon intimité ? Pour partager un moment si personnel ? Comment peux-tu me faire jouir et ne pas m’aimer ? Comment puis-je jouir et ne pas t’aimer ? Il faudrait que je t’aime alors, mais c’est impossible. Je ne suis pas disposé à t’aimer, je dois d’abord tuer mon passé ou vivre avec, mais en ce moment ce n’est pas le cas. Dans un des tiroirs de la commode, il y a un flacon de poppers et pour oublier ce que je suis, ce que je fais, je commence à renifler mécaniquement la fiole. La tête tourne, mon cœur s’accélère et je bande. Je deviens presque fou, je me déshabille de nouveau et commence à me masturber. L’odeur a réveillé Cédric. Il voit mon sexe en érection et l’état dans lequel je suis. Disponible. Terriblement sexuel. Il prend le flacon, en respire le contenu, son sexe large se gorge de sang, il m’attrape le visage, fourre sa langue dans ma bouche. Je me mets à quatre pattes et commence à sucer son sexe énorme. Je n’en peux plus de voir son sexe, de le sentir chaud dans ma bouche et je me mets à sucer, sucer. Il le frappe contre mes joues, force l’entrée de mes lèvres, m’attrape le visage, je me sens soumis, terriblement à disposition de ses envies et cela m’excite. Il commence à se masturber, je respire encore le poppers, je me masturbe à mon tour, la tête tourne, le décor s’effondre, je ne suis plus dans ma chambre mais dans une bulle aux parois sombres, mon cœur fait trembler mon corps, sa masturbation s’accélère, je tends la langue parce que je sens qu’il va venir. Et il vient. J’enfourne son sexe dans ma bouche, je sens le jus couler dans ma gorge, chaud, salé. Je jouis à mon tour, sur la couette blanc cassé. Pause. Reprendre sa respiration. Refaire surface. Les contours de la chambre se redessinent progressivement. Je vois de nouveau. Je pars dans la salle de bain, me rince la bouche, me frotte le visage.

Sous la douche, l’eau brûlante me fouette le visage. Je reste la tête collée contre les carreaux du mur. Je fais le vide. Quand je sors, je suis enfin propre et léger. Je me dirige vers le bureau, allume l’ordinateur et charge What Else Is There de Röyksopp. Je monte le volume et me dirige dans la cuisine, sors quelques fraises fraîches en dansant. Cédric me rejoint et je l’accueille avec un sourire.

Tu as bien dormi ?

Finalement, il peut bien rester encore. De toute façon, il n’a retardé son départ que de quelques jours. Demain, il sera parti. C’est moi qui ai un problème.